Luxe.net : les tendances émergentes du luxe
Olivier : bonjour Massine, tu es le fondateur de luxe.net qui est devenu un jeune magazine référent dans le monde du luxe avec maintenant plus de 10.000 visiteurs par jours, tu es également contributeur Forbes France où tu as, par exemple, signé des articles sur Chopard et le développement durable, sur la Modern Phuket Villa ou bien encore sur les grandes complications de la marque Hysek, quelle est ton opinion sur les changements qui ébranlent le marché du luxe aujourd’hui ? Quelles tendances sens-tu poindre ?
Massine : pour être représentatif de ce qui se passe dans l’univers du luxe, luxe.net se doit d’avoir une couverture large. Nous traitons de différents sujets : le design, les voitures, les voyages, la high-tech, la gastronomie, la culture, l’évènementiel… Le luxe n’est pas monolithique. Nos clients et nos lecteurs peuvent s’intéresser aussi bien à une montre chez Jaeger-Lecoultre qu’à des vacances en catamaran dans les îles grecques. Cela nous permet aussi de comparer la popularité des différents sujets et de relever ce qui entre en ébullition.
Olivier : du coup, en ce moment, qu’est-ce que tu sens émerger ?
Massine : chez les populations les plus jeunes, ce sont les collaborations dans le domaine de la mode qui rencontrent le plus de succès. Tout ce qui mélange luxe et streetwear. Virgil Abloh chez Louis Vuitton, Rimowa X Supreme, Balenciaga et ses sneakers Triple S… On est sur du consumérisme hédoniste et on sent bien à quel point les générations Y et Z sont en train d’imposer leur marque à des maisons de coutures qui avaient besoin de renouvellement. Les populations plus âgées sont clairement attirées par les voitures électriques autonomes notamment les Tesla même si Mercedes n’est pas en reste.
Olivier : quel est le plus gros changement que tu aies senti ces dernières années ?
Massine : probablement ce que vous expliquiez très bien dans l’un de vos articles précédents, aujourd’hui, dans le monde de l’ultra luxe et le haut de gamme du luxe, les clients ne cherchent plus la satisfaction à travers un produit mais plutôt a travers une experience à vivre. Une marque de luxe qui ne propose pas d’expérience n’est plus considéré comme une marque de luxe aujourd’hui mais comme une marque haut de gamme.
Olivier : la clientèle luxe a changé ?
Massine : d’avantage de personnes sont prêtes à sacrifier une partie de leur salaire ou à économiser pour s’acheter un produit de luxe même lorsque cela n’est pas dans leurs moyens et ce particulièrement dans l’industrie de la mode. C’est un comportement qui était très chinois au début et qui s’est très largement répandu dans les sociétés occidentales. Les jeunes consommateurs ont parfois l’air de préférer une certaine « insertion sociale » plutôt que de simplement répondre à leurs besoins. D’autre part, les vieilles segmentations du luxe tendent à s’effacer. Les ultra-riches se comportent comme tous les autres Y, ils ont juste plus de moyens. Quand aux consommateurs qui ne sont pas fortunés, ils se tournent vers des produits du luxe accessible. Il suffit de se promener dans les rayons mode des Galeries Lafayette par exemple pour s’en convaincre.
Olivier : il y a un angle d’attaque aujourd’hui pour toucher ces cibles ?
Massine : si le bouche à oreille et la recommandation restent toujours les armes principales dans les milieux ultra-luxe, même les cibles fortunées sont de plus en plus sensibles aux réseaux sociaux. Les influenceurs, les chanteurs, les artistes exercent une emprise indéniable. Ce sont des prescripteurs de nouvelles tendances et de nouveaux produits luxe. Mais la communication ne peut pas se suffire à elle-même. Une communication sans produit de qualité et sans innovation ne tient pas sur la durée.