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La ligue de protection des oiseaux : protéger la biodiversité en accompagnant les entreprises

Ligue de protection des oiseaux LPO Fast & Fresh Emilie Gobert Bird Life international

Olivier : bonjour Emilie, tu es la directrice du pôle développement de la LPO, la ligue pour la protection des oiseaux. Depuis deux ans et demie, ta mission consiste à organiser le mécénat et les partenariats avec des entreprises et des fondations privées mais aussi les collectes de rue auprès du grand public. Missions particulièrement importantes puisque ce sont ces fonds qui permettent à l’association de financer les actions de protection de la nature et de la biodiversité que vous menez partout en France. Est-ce que tu voudrais bien nous en dire un peu plus ?

Bird Life International est l’un des plus grosses associations de protection locale de la biodiversité

Emilie : le public français connaît assez peu la ligue de protection des oiseaux. Des associations comme WWF ou bien Greenpeace ont une aura médiatique souvent bien plus importante que la nôtre. Pourtant, la ligue de protection des oiseaux est l’une des plus anciennes associations de protection de la nature en France : créée en 1912, la LPO sera même la première association de protection de la biodiversité reconnue d’utilité publique. D’autre part, l’habit ne fait pas le moine : dans la pratique, la LPO est le représentant français de Bird Life International l’une des plus grosses alliances mondiales de protection de la nature. En effet, Bird Life réunit pas moins de 120 associations de par le monde sous le haut patronage de Noor de Jordanie et de la princesse Hisako Norihito de Takamado.

Olivier : comment expliquer que vous ayez un tel poids sur le terrain tout en étant un peu moins connus que vos consoeurs plus médiatiques ?

Emilie : plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, comme chacune des associations du groupe Bird Life International opère sous son propre nom, nous sommes présents dans beaucoup de pays mais peu identifiés. Alors qu’en réalité, notre maillage européen est si fort que nous sommes par exemple capables de peser sur les négociations de la PAC. D’autre part, nous tenons à rester indépendants, militants et apolitiques ce qui nous amène à être davantage des faiseurs que des communicants. Nous travaillons avec beaucoup d’acteurs différents, avec ce qui veulent avancer, sans préjugés et nous les aidons à changer et à améliorer leur pratiques de façon souvent assez silencieuse. Nous préférons les actions locales sur le terrain aux actions coup de poing au niveau national. Ce que tes élèves demandaient par exemple dans l’un de tes articles précédents. Mais, notre association a largement gagnée en notoriété depuis qu’Alain Bougrain-Dubourg, figure hautement médiatique, nous a rejoint comme président.

Un tiers des effectifs d’oiseaux ont disparu ces 15 dernières années

Olivier : pourquoi la LPO est-elle importante aujourd’hui ? Dans un monde où l’accès à la nature est devenu difficile en ville.

Emilie : nos études montrent que 93% des français se disent préoccupés par la sauvegarde de la biodiversité. Et ils ont raison : nous assistons à un véritable effondrement de la biodiversité ordinaire. Donnons un chiffre simple pour illustrer la situation : un tiers des effectifs d’oiseaux ont disparu durant les 15 dernières années. Alors même qu’en parallèle, nous avons pu montrer que les mesures de sauvegarde des espèces et de leurs habitats permettaient de façon très efficace le retour des grands rapaces, des cigognes, des loutres, des castors… Notre travail consiste donc à aider l’état, les élus, les particuliers mais aussi les acteurs privés à prendre conscience du problème et à leur donner la formation et les outils nécessaires pour le régler. Et je souligne que nos actions concernent l’ensemble de la biodiversité même si notre nom peut laisser penser que nous ne nous focalisons que sur les oiseaux.

À Ligue de protection des oiseaux, nous protégeons, nous formons et nous mobilisons

Olivier : comment votre association est-elle organisée aujourd’hui ?

Emilie : la ligue de protection des oiseaux est organisée autour de 3 grands pôles :

Nous avons lancé des programmes de recensement de la faune auxquels tout un chacun peut participer

Olivier : vous avez également lancé une opération avec le Muséum National d’histoire naturelle je crois ?

Emilie : nous avons lancé deux programmes coordonnés en réalité. D’une part, Faune France qui s’essaie à recenser toute la faune présente en France en alimentant des bases de données locales et régionales. Nous suivons les batraciens, les insectes, les oiseaux… et nous avons collecté pas moins d’1 million de données en deux ans grâce au travail acharné de 70.000 contributeurs semi-professionnels ou professionnels. La base nous sert notamment à connaître l’état des populations, par exemple celle des oiseaux migrateurs et nous permet d’orienter nos actions de conservation et de conseiller les politiques publiques. Si les bénévoles n’étaient pas là, nous devrions engager près de 3000 personnes à temps plein, ce qui nous est impossible : c’est toute la force de ces outils collaboratifs. D’autre part, nous avons également lancé le programme Oiseaux des jardins -qui est une version plus abordable de Faune France– destiné au grand public et qui recueille des données sur les oiseaux dans l’environnement proche des gens. L’application a cartonné pendant le confinement parce que les gens avaient le temps et l’attention nécessaire mais aussi parce qu’ils se sont aperçus que des oiseaux revenaient avec le silence. Ces données nous permettent de sauvegarder des espèces et des espaces en luttant contre les lignes électriques qui dérangent les rapaces, les haies arrachées et les forêts détruites qui perturbent les oiseaux des plaines agricoles ou bien encore les pertes d’habitat pour les insectes quand il n’existe aucune bande de terre non cultivée.

Pas de greenwashing, nous n’aidons que les entreprises qui veulent vraiment avancer

Olivier : un dernier mot peut-être sur les entreprises que vous aidez ? C’est chose facile ?

Emilie : les associations étaient mal perçues au départ par les entreprises qui méprisaient un peu les ONG mais c’est complètement différent maintenant. Les enjeux environnementaux sont pris réellement au sérieux, les obligations RSE poussent les choses et quand il y a des sujets qu’on n’arrive pas à débloquer, on essaie d’avancer sur d’autres. Mais jamais de greenwashing : notre comité éthique se réunit pour valider les fiches d’opportunité des partenariats. Si nous voyons qu’une entreprise n’est pas un partenaire sérieux et nous utilise juste pour faire de l’image, nous n’acceptons pas. D’ailleurs, le fait que des entreprises participent à notre mécénat ne nous empêche pas d’être indépendant et même de porter plainte dans certains dossiers. Mais les entreprises peuvent également s’avérer des alliés précieux : les employés s’engagent sincèrement, nous avons accès à des sites inaccessibles autrement et elles nous aident parfois à ouvrir des portes.

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