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Comment créer de bonnes expériences utilisateur

Mauvaise expérience utilisateur : l’erreur centrale à ne pas commettre

C’est en comprenant ce qu’est une mauvaise expérience utilisateur que vous pourrez en produire de meilleures

Pour comprendre la façon dont un peut créer une bonne expérience utilisateur, il faut comprendre par contraste ce qu’est une mauvaise expérience utilisateurs. En effet, c’est le contraste entre les deux qui va vous permettre de saisir les erreurs récurrentes à ne pas commettre et qui produisent de mauvaises expériences. Ainsi, les connaissant, vous allez pouvoir commencer de les repérer et de les éviter.

Première erreur : le marché vous pousse dans une certaine vision de l’expérience utilisateur

Depuis 2010 en France, l’UX a littéralement explosé. L’ergonomie et l’expérience utilisateur qui étaient des sujets assez confidentiels ou mal connus avant cette date sont devenus centraux. Aujourd’hui, je ne compte plus le nombre de cursus qui ont ouvert et Google, qui comptait 4 agences d’UX, au plus, en 2010 est à présent noyé sous les résultats de recherche.

Tant mieux, l’utilisateur commence enfin d’être reconnu.

Le problème, c’est que tous les cursus ne se valent pas : certains sont réellement très courts ou n’ont formé que des techniciens, un peu à la va-vite, et qui heureusement, continuent de se former par eux-mêmes pour qu’ils ne leur manquent plus les bases structurantes pour réfléchir leur discipline.

De même, le nombre d’agence d’UX sur le marché donne le tournis mais elles vendent toutes la sacro-sainte trinité : parsonae-parcours utilisateurs-maquettes durant des ateliers post-its mais à la fin, est-ce que c’est de l’expérience ou bien un nouvelle méthode graphique de conception d’interfaces ?

Et, parfois, les clients s’en moquent un peu : l’UX est devenu si courante qu’elle en est réduite à un tampon à la mode. « C’est bon, on a un ux designer, on a fait de l’UX« .

Du coup, les clients veulent de l’interface graphique, les agences doivent faire de l’interface graphique, les UX sont réduits à faire des maquettes au kilomètre toute la journée et les blogs parlent d’UX-UI. Bref, le marché vous pousse vers le problem solving.

Et le problem solving : c’est de la mauvaise expérience utilisateur. C’est juste résoudre des problèmes, c’est tout.

Deuxième erreur : vous avez peut-être oublié ce que c’est qu’une expérience ?

Fermez les yeux.

Pour de vrai.

Pendant 5 mn.

Et essayez de vous rappeler du plus profond de votre être ce que c’est qu’une expérience.

Qu’est-ce qui a compté pour vous ces dernières années.

Et je veux dire vraiment compté ?

Ce qui vous a fait vous sentir vivant.

Qu’est-ce que c’est ?

La nouvelle interface de votre interface bancaire ? La nouvelle campagne publicitaire de votre assurance ? La nouvelle scénographie de votre magasin d’électro ménager ?

Je crois connaître la réponse.

Tout simplement parce que ces choses ne sont pas des expériences : ce sont des améliorations de la qualité de vie, au plus.

Parfois des améliorations graphiques, parfois des améliorations ergonomiques, et surtout des améliorations technologiques.

Ce qu’on vous vend, c’est donc tout sauf de l’expérience.

Ou plus exactement : c’est de la mauvaise expérience utilisateur

la mauvaise expérience utilisateur c'est d'avoir oublié la poésie
Une vue d’Oia à Santorin, à la nuit tombée, prise par Pedro Szekely et qui retranscrit bien la magie de Santorin
lorsqu’elle n’est plus étouffée de touristes

Troisième erreur : regardons du côté des ressources humaines des agences UX pour comprendre comment les mauvaises expériences utilisateurs sont produites

Quels sont les profils d’employés et placardés avec beaucoup de fanfaronnades sur les murs digitaux des agences UX ?

  • UX Data : c’est à dire des gens qui font du data mining pour suivre les usagers et essayer de prédire leur comportement
  • User Researchers : qui n’ont la plupart du temps pas le moindre diplôme en Psychologie ou en Sociologie
  • Designers UI : c’est à dire des gens qui font de l’interface voire pour certains du graphisme au sens le plus noble du terme mais uniquement de l’interface digitale sur écran, pas de l’expérience au sens plus large
  • UX front end : c’est à dire, en réalité, des développeurs qui s’assurent que l’interface sera souple à l’usage, bien animée et bien intégrée mais à qui on laisse généralement peu de latitude pour explorer quoi que ce soit d’autre de technologiquement disruptif

Hum Hum (je me racle la gorge), j’aime beaucoup ces compétences. Je les connais bien, je les forme chez Epitech Digital (IONIS), je les engage moi-aussi dans mon agence et ils savent que j’essaie toujours de les émanciper.

Mais revenons à notre sujet : la mauvaise expérience utilisateur.

Il ne manque rien à votre avis ?

Qui se charge de l’expérience au sens le plus propre du terme ?

Qui travaille sur la chose à ressentir ?

Qui la comprend ?

Qui travaille sur le moment de poésie ?

Sur ce que ressentent véritablement les usagers ? Sur ce dont ils ont profondément besoin ? A quel moment s’en soucie-t-on ? Vraiment, je veux dire ?

La mauvaise expérience : c’est faire des parcours usagers e-commerce confortables pour amener les usagers à acheter plus sans jamais se poser la question de les émanciper

Force est de constater aujourd’hui que la plupart des agences, aujourd’hui, si on regarde bien les choses, se contrefiche de l’expérience des usagers.

A de rares exceptions près, la plupart du temps, les agences UX sont mandatées par un client pour faire un parcours e-commerce. Et je ne doute pas qu’elles essaient de le faire bien et d’améliorer les choses mais à la fin, ce qu’elles font s’appelle de l’amélioration cosmétique de surface.

C’est plus joli, ça glisse mieux mais on n’a rien remis en question.

Rien de véritablement profond : on n’a surtout pas fait voler de plumes dans le poulailler. L’église a commandé un tableau, on l’a peint. Peu importe que l’usager ressente quelque chose du moment que l’église est contente. Et c »est d’ailleurs ce que j’aime chez Léonard de Vinci et chez Raphaël aussi : ils ne respectaient jamais les commandes.

Et plus profondément, il y a souvent une confusion grave dans les agences UX sur ce que c’est que l’expérience : pour elles, l’expérience serait « soluble » dans photoshop. Il suffirait de créer un parcours utilisateur avec la méthode agile, de faire une interface sous photoshop et de l’animer pour avoir fait de l’expérience. Ah bon ? Ça suffit pour vous faire ressentir quelque chose vous ? Moi, ce n’est pas ce que j’enseigne à mes élèves.

Et puis, surtout, la question éthique : mettre de la crème pour vendre plus, c’est quand même un peu du neuromarketing non ? Quand on n’a aucunement l’intention de proposer une vision plus large à l’usager que celle d’acheter.

Une mauvaise expérience utilisateur : c’est réduire la relation client à une simple transaction en oubliant que nous sommes humains et que les économies d’échelles, ça va bien un temps mais ça ruine tout.

La bonne expérience utilisateur : c’est peut-être rater quelque chose

On me dira certainement que j’exagère sur mes points de vue.

Pourtant, quoi de plus triste (cas réel, vécu) que d’être assis dans une salle de création avec une grande agence de conseil et d’ux impliquée dans des scandales d’état et qui dit au client en vous regardant dans les yeux : « Ah, je ne pensais pas qu’on était là pour transformer la vision de l’utilisateur sur le produit et pour changer sa vie, on est là pour vendre non ? »

Effectivement, nous ne partageons pas les mêmes valeurs 🙂

L’expérience, c’est changer quelque chose de profond et faire ressentir quelque chose non pas pour vendre mais parce que c’est authentique et important. C’est tout le mystère et l’occulte de l’expérience. C’est ce qui fait sa joie.

Alors c’est vrai. Peut-être que tous les clients ne se prêtent pas à l’expérience du coup. Mais j’en doute.

Quand on connaît les clients et qu’on parle avec eux, ce sont des êtres humains, avec des questions profondes, même en entreprise, surtout peut-être en entreprise. Même dans les entreprises les plus austères. Et ils ont toujours quelque chose à partager même si ce n’est pas toujours évident au premier regard.

Souvent parce que c’est enseveli depuis longtemps sous des tonnes de culture d’entreprise ou les habitudes de production et la peur de couler.

Le premier conseil que je pourrai vous donner : si vous ne voulez pas faire de la mauvaise expérience utilisateur : ratez ! Ratez quelque chose. Ne faites pas ce qu’on attendait de vous. Ratez quelque chose. Arrêtez de cuisiner ce qu’on vous a demandé. Apprenez à danser.

Olivier est le directeur de l'agence de Recherche Utilisateur & Stratégie Utilisateur Fast & Fresh. Spécialiste en comportement consommateur, il travaille avec le laboratoire de Psychologie de Montpellier 3 pour aider les marques à comprendre leurs utilisateurs et à construire de vraies relations de marques et d'entre-aide. Pas de neuromarketing chez Fast & Fresh, nous ne pensons pas que brutaliser vos utilisateurs pour vendre des produits soit la bonne solution.